
Trois ans après le succès critique et commercial du premier film, Scott Derrickson revient avec Black Phone 2, une suite que beaucoup attendaient avec impatience. Produit une fois encore par Blumhouse Productions, le long-métrage reprend les codes de l’horreur surnaturelle qui avaient fait mouche en 2022, tout en cherchant à développer un univers plus large, plus complexe et plus émotionnel. Le résultat? Un film aussi intrigant qu’imparfait, oscillant entre hommage rétro et exploration du traumatisme.
Ce qui fonctionne parfaitement
Dès les premières minutes, Black Phone 2 impose une atmosphère saisissante. Le réalisateur délaisse les ruelles sombres du premier opus pour un cadre plus vaste : un camp d’hiver isolé, perdu au milieu d’un paysage enneigé et étouffant de silence. Ce changement de décor est l’une des meilleures idées du film : il offre un contraste visuel fort et crée une tension permanente.
“Comme déjà mentionné par plusieurs médias, « le décor glacial agit comme un personnage à part entière, symbole de la mémoire figée et du deuil non résolu ».

Les séquences oniriques, filmées en Super 8 granuleux, ajoutent une patine étrange, presque nostalgique, rappelant le cinéma d’horreur des années 1980. Ces moments, à la frontière du rêve et du souvenir, participent à créer une ambiance entre cauchemar et mélancolie. Rogerebert.com souligne d’ailleurs que « Derrickson retrouve ici la justesse visuelle qui faisait la force du premier film ».
Le casting, lui aussi, brille. Mason Thames reprend le rôle de Finney, désormais adolescent hanté par son passé, tandis que Madeleine McGraw (Gwen) s’impose véritablement comme la protagoniste centrale. Sa détermination et sa fragilité donnent au récit une portée émotionnelle rare pour un film d’horreur. Ethan Hawke, quant à lui, effectue un retour inattendu mais fascinant dans la peau du « Grabber ». Le personnage, à mi-chemin entre spectre et symbole du mal absolu, devient ici une icône horrifique à part entière, presque mythologique.
La mise en scène, sobre et efficace, privilégie les ombres, les reflets et les sons étouffés pour maintenir une tension continue. Derrickson utilise moins le jump-scare que dans son précédent film ; il préfère installer la peur dans la durée, à travers le silence, les murmures du téléphone noir et les visions de Gwen.

Les limites et les faiblesses
Cependant, tout n’est pas aussi maîtrisé. Black Phone 2 souffre d’un scénario inégal, parfois trop explicatif. L’intrigue tente de lier plusieurs thèmes que sont la culpabilité, la mémoire, la peur héritée sans toujours parvenir à leur donner un sens cohérent.
Certains passages, notamment ceux centrés sur les visions de Gwen, s’étirent inutilement. Leur symbolisme, au lieu d’éclairer l’histoire, finit par la ralentir.
De plus, le film multiplie les clins d’œil à l’horreur classique, notamment à A Nightmare on Elm Street ou It Follows. Si ces références raviront les fans du genre, elles rendent parfois le film trop familier. Le Grabber, désormais plus bavard et caricatural, perd un peu de son aura terrifiante. Certains critiques estiment même que Derrickson le transforme en une version « Freddy Krueger 2.0 » un monstre spectaculaire, mais moins mystérieux.
Enfin, plusieurs personnages secondaires manquent de consistance. Les nouveaux visages introduits dans l’histoire, bien que prometteurs, servent surtout à faire avancer l’intrigue sans véritable développement émotionnel. On regrette que le film n’exploite pas davantage la relation entre Finney et sa sœur, pourtant au cœur du propos sur la résilience.

Mon avis personnel
En tant que suite, Black Phone 2 réussit son pari principal : il évite la redite et tente de raconter une nouvelle histoire dans le même univers. J’ai particulièrement apprécié son atmosphère glaciale, sa photographie presque picturale, et l’idée de faire de Gwen une héroïne plus affirmée. Le film trouve sa propre identité, plus spirituelle et mélancolique que le premier.
Cependant, cette ambition se fait parfois au détriment de la tension. Là où le premier Black Phone était un huis clos étouffant, cette suite se disperse. Les scènes explicatives affaiblissent la peur, et le rythme irrégulier empêche l’histoire de garder toute sa puissance dramatique.
Conclusion
Black Phone 2 est une suite honnête et soignée, qui réussit à prolonger l’univers sans le trahir. Scott Derrickson prouve une nouvelle fois sa maîtrise de la mise en scène et sa capacité à créer une peur viscérale sans recourir à l’excès. Il dégage une atmosphère singulière, plus triste que terrifiante, qui reste en tête bien après le générique.
Malgré quelques longueurs et une narration parfois déséquilibrée, cette suite offre un regard intéressant sur la survie psychologique après la terreur. C’est un film d’horreur qui préfère murmurer plutôt que crier, et qui, dans ses meilleurs moments, parvient à toucher autant qu’à effrayer.



Laisser un commentaire