Une suite audacieuse… mais risquée
La saison 3 d’Alice in Borderland prend un virage inattendu: elle dépasse le manga original. Là où beaucoup de séries se perdent en voulant prolonger leur succès, celle-ci tente une extension narrative qui, malgré quelques faux pas, reste cohérente avec l’univers. On retrouve Arisu et Usagi dans un Tokyo revenu à la normale ou presque. Leur quotidien semble paisible, presque banal, mais une tension sourde plane. Arisu, hanté par les souvenirs de Borderland, peine à se reconnecter à la réalité. Et lorsque Usagi disparaît mystérieusement, tout bascule.

Ce n’est pas un simple enlèvement : c’est le retour des jeux. Mais cette fois, ils sont orchestrés par Ryuji, un psychiatre en fauteuil roulant qui croit que Borderland est une passerelle vers l’au-delà. Il manipule les souvenirs, les émotions, et pousse Arisu à replonger dans l’arène. Ce nouveau cycle de jeux n’a rien d’aléatoire : il est conçu pour tester la résilience psychologique, la capacité à affronter ses traumas, et surtout, à choisir entre vérité et illusion.

Des personnages cabossés mais puissants
Ce qui m’a marqué, c’est la manière dont les personnages évoluent. Arisu n’est plus le jeune homme perdu du début : il est brisé, mais lucide. Sa quête n’est plus de survivre, mais de comprendre. Usagi, elle, devient le symbole de l’ancrage émotionnel sa disparition est le catalyseur de toute l’intrigue. Leur relation, plus intime, plus mature, donne une vraie densité à l’histoire. On sent que les cicatrices ne sont pas que physiques : elles sont mentales, existentielles, et ça résonne fort.

On regrette l’absence de figures emblématiques comme Chishiya ou Kuina, qui apportaient une tension stratégique et un contrepoids moral. Leur absence crée un vide, mais elle permet aussi de recentrer l’histoire sur Arisu et sa propre reconstruction.

Le Joker, une métaphore sociale
Le Joker, nouvel antagoniste, n’est pas juste un boss final. Il incarne une vision glaçante de la société : celle où l’individu n’a de valeur que par sa performance. Les jeux ne cherchent plus des survivants, mais des citoyens utiles. Chaque épreuve est calibrée pour éliminer les faibles, non pas physiquement, mais psychologiquement. C’est une critique limpide du néolibéralisme, de la pression sociale, et de la quête de productivité à tout prix.

Ce qui m’a frappé, c’est que le Joker ne parle presque jamais. Il observe, il jauge, il classe. Il est l’œil froid d’un système qui ne juge pas les intentions, seulement les résultats. Et ça, c’est terrifiant.

Mise en scène : toujours aussi nerveuse
Visuellement, la série reste une claque. Les décors dystopiques, les jeux mortels, les effets de lumière… tout est calibré pour maintenir la tension. Chaque épisode est une montée en puissance, avec des jeux plus psychologiques que physiques. L’un des plus marquants : un labyrinthe de miroirs où les joueurs doivent affronter leur propre reflet littéralement et symboliquement. Ce genre de mise en scène, à la fois esthétique et philosophique, montre que la série ne se contente pas de choquer : elle veut faire réfléchir.

Les six épisodes d’une heure sont rythmés, même si quelques incohérences narratives viennent gripper la mécanique. Certains flashbacks sont trop appuyés, et le rythme ralentit parfois inutilement. Mais dans l’ensemble, la tension est bien dosée.

Une fin en trompe-l’œil
La conclusion laisse planer le doute. On croyait avoir bouclé la boucle à la fin de la saison 2, mais cette carte Joker, apparue en épilogue, relance le jeu. Est-ce une vraie fin ou une nouvelle illusion? Personnellement, j’ai aimé ce flou. Il laisse la porte ouverte à l’interprétation, et ça colle parfaitement à l’esprit de la série. Arisu, face à un choix final, ne sait plus ce qui est réel. Et nous non plus.

Mon verdict personnel
J’ai abordé cette saison avec méfiance, craignant le syndrome de la suite de trop. Mais j’ai été surpris. Alice in Borderland saison 3 réussit à prolonger l’univers sans le trahir. Elle creuse les thématiques de la mémoire, du deuil, et de la reconstruction avec une maturité inattendue. Ce n’est pas parfait, mais c’est sincère. Et ça, dans le monde des séries, c’est rare.

Pour écouter la serie, c’est ici.

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