Un concept prometteur, mais mal exploité
All the Words She Wrote est un visual novel développé par ebi-hime, une autrice britannique bien connue pour ses récits à la fois mélancoliques et introspectifs! Le jeu est d’abord sorti en 2022 sur PC avant d’être offert sur Nintendo Switch (version testée aujourd’hui). Il est proposé exclusivement en anglais, sans traduction officielle disponible à ce jour, ce qui peut créer une certaine barrière pour les joueurs non anglophones! Le jeu adopte un court format pour le genre – environ 6-7 heures de lecture – et s’inscrit dans une lignée très… très littéraire, sans aucune interaction de la part des joueurs, misant ainsi le tout sur la narration et l’ambiance. Ce choix est très osé selon moi, car si cette approche purement linéaire peut convenir à un certain public, elle risque également de perdre une partie de son impact émotionnel. De plus, sans choix ni participation active, le jeu échoue malheureusement à maintenir l’attention des joueurs sur la durée, rendant de ce fait son scénario — pourtant chargé d’intentions — étonnamment fade et oubliable…

Sur Nintendo Switch, le jeu est disponible uniquement en téléchargement via l’eShop, au prix d’approximativement 10 à 15$, selon les promotions. Il ne propose ni voix doublées ni options de rejouabilité poussées (tout comme la version PC), mais se veut tout de même une belle expérience — brève — et émotionnelle… pour les amateurs du style caractéristique d’ebi-himedu moins… mais pas pour moi!

Un scénario intéressant, mais distancé
Le jeu se présente comme une aventure narrative intimiste et introspective, centrée sur les souvenirs, la rupture amoureuse et la reconstruction de soi! Ce sont des thèmes fort intéressants et on y retrouve aussi des protagonistes auxquels on s’attache facilement. Sur papier, le jeu a donc tout pour séduire les amateurs d’histoires personnelles et sensibles… Malheureusement, dès les premières minutes, le constat est sans appel : le potentiel du concept est considérablement sous-exploité, et l’expérience… comment dire… peine à véritablement décoller! Je suis donc malheureusement restée sur ma faim après avoir complété «l’expérience» de ce jeu.

En effet, dans All the Words She Wrote, on suit Takaoka Mayo, une jeune femme de 24 ans, sans ambition particulière et qui passe ses journées à enchaîner des petits boulots et à vivre chez ses parents! Sa plus grande passion ? Une héroïne fictive nommée Princess Luluna, star d’une série de light novels fantastiques intitulée The Forest of the Elves and the Pressured Princess. Mayo voue un véritable culte à ce personnage fictif, au point de remplir sa chambre de « goodies » et de posters à son effigie. Mais sa routine est bouleversée le jour où une connaissance de la famille lui propose un emploi inespéré : devenir l’aide ménagère de Tsuchimi Rui, l’écrivaine de Elf Forest, actuellement en panne d’inspiration! Mayo accepte sans hésiter, persuadée qu’elle va rencontrer un vieil auteur excentrique… avant de découvrir que Rui est en réalité Komikado Hijiri, une jeune femme sarcastique, farouchement asociale, et bien plus intimidante que prévu! Obligée de vivre sous le même toit que cette créatrice insaisissable, Mayo va peu à peu dépasser ses fantasmes pour découvrir la personne réelle derrière l’autrice. Entre idolâtrie, maladresses et liens naissants, All the Words She Wrote explore ainsi avec délicatesse et ironie la frontière entre fiction et réalité, et questionne l’évolution d’un attachement inattendu.

Et même si l’histoire de All the Words She Wrote repose sur un concept au fort potentiel narratif, et que son synopsis m’avait sincèrement charmée par sa promesse d’un huis clos tendre et original… le contenu du jeu lui-même s’avère malheureusement bien en deçà des attentes! Passé l’enthousiasme initial, on réalise vite que la richesse émotionnelle suggérée sur le papier ne se traduit pas réellement à l’écran: Le développement reste superficiel, les dialogues manquent d’intensité, et l’ensemble peine à susciter un véritable attachement ou une immersion durable. De plus, en l’absence d’interactivité ou d’évolution marquante dans la relation entre les personnages, l’expérience reste figée, trop sage, et finit par laisser une impression de vide. Ainsi, ce qui aurait pu être une aventure sensible et passionnée se révèle au final trop mince pour offrir une expérience réellement enrichissante aux joueurs!

Une narration fade et peu immersive
Le cœur de All the Words She Wrote repose entièrement sur son récit et sa direction artistique, dans la plus pure tradition du visual novel! Malgré un cadre prometteur — la cohabitation entre une « fangirl » désœuvrée et une écrivaine asociale — le jeu peine à transformer cette idée en véritable huis clos émotionnel… Le développement narratif reste même étonnamment plat : les échanges ne parviennent que rarement à susciter une tension dramatique, et les dialogues manquent souvent de naturel, voire de rythme! L’évolution de la relation entre les deux protagonistes est tellement minime qu’elle semble absente, comme si le jeu hésitait à faire progresser leurs dynamiques émotionnelles alors qu’elle est au centre de l’histoire… Ainsi, malgré quelques moments d’humour ou de tendresse, l’ensemble donne une impression de stagnation, et ce manque d’évolution narrative rend l’expérience de plus en plus passive, allant même jusqu’à perdre l’investissement et l’intérêt du joueur. Malheureusement, l’écriture, pourtant centrale, ne parvient simplement pas à porter à elle seule l’expérience, ce qui rend cette aventure textuelle rapidement monotone…

On ne propose également aucun choix aux joueurs, ce qui donne rapidement l’impression de n’être que le spectateur d’un récit figé, avec très peu d’espace pour l’interprétation ou la projection personnelle… Pour un jeu qui se veut centré sur les émotions, l’histoire manque cruellement de nuance et de profondeur!

Et pour ce qui est des graphiques et des sons —  éléments principaux du jeu —  , le tout est loin d’être suffisant pour créer une ambiance incroyable et une expérience à la fois passionnante et divertissante pour le joueur… Le jeu adopte une esthétique inspirée des visual novels japonais classiques : décors sobres, mais travaillés, et personnages dessinés dans un style manga aux teintes pastel. L’univers graphique aurait pu participer à créer une ambiance épurée et contemplative… Or, il donne plutôt l’impression d’un manque d’investissement artistique. L’esthétique minimaliste ne parvient jamais à s’élever au-delà de l’esquisse, et ne propose que très peu de variations visuelles ou de mises en scène marquantes.

Conclusion : un jeu vite oublié
Bref, All the Words She Wrote avait les ingrédients pour proposer une expérience émotive et intimiste, mais échoue à rendre le tout mémorable. Avec une narration trop lisse, une direction artistique sans relief et un gameplay inexistant, le jeu arrive difficilement à marquer les esprits. Un titre qui, malgré de bonnes intentions, s’oublie aussi vite qu’il se termine! Et à cela s’ajoute une lecture automatique bien trop rapide, qui oblige soit à lire à toute vitesse, soit à cliquer manuellement sur chaque ligne, ce qui m’a davantage agacée qu’immergée, d’autant plus qu’aucun choix narratif ne vient justifier cette contrainte…

Cela dit, malgré sa narration linéaire et son rythme parfois trop statique, All the Words She Wrote peut tout de même séduire un certain public — en particulier les fans d’ebi-hime, qui retrouveront ici les thèmes chers à l’autrice : solitude, malaises relationnels, et introspection teintée de douceur amère! Les dialogues, bien que parfois inégaux, laissent tout de même entrevoir des moments sincères et vulnérables, et les deux protagonistes, Mayo et Hijiri,  peuvent s’avérer très attachantes et faciles à comprendre, voire très identifiables pour les joueurs qui se reconnaîtront dans leurs insécurités ou leur manière d’aborder les relations! Pour les amateurs de visual novels lents, centrés sur les émotions et les échanges du quotidien, bien que sobre dans sa construction, ce huis clos entre deux personnalités que tout oppose — ou presque — parvient par moments à livrer une touche de sincérité bienvenue!

Merci à Ratalaika Games pour la copie du jeu.

Pour se procurer le jeu, c’est ici.

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