
Intrigues de palais et ambiance «nid de vipères»
La Servante de l’empereur est un nouveau manga qui vient d’être publié en version française le 20 février 2025 par les éditions Ki-oon. Il s’agit en réalité de l’adaptation du light novel japonais Kōtei Heika no Osewagakari, écrit par Ichiha Hiiragi et illustré à l’origine par Aya Shōoto. L’adaptation graphique du manga a toutefois été confiée à Haruki Yoshimura, et le résultat ne déçoit certainement pas! Il s’agit d’un manga qui s’adresse aux amateurs d’histoires de cour, mêlant intrigue, romance et comédie, le tout dans un univers impérial délicatement illustré.
Bien évidemment, cela n’est pas sans rappeler toutes les variétés de récits à la cour que les éditions ne cessent de nous offrir, comme les Carnets de l’apothicaire, Remède impérial: enquêtes à la cour ou même le Palais des assassins. Haruki nous offrent donc ici un décor bien connu, couronné cependant d’une héroïne bien particulière… loin de notre Mao Mao (les Carnets de l’apothicaire) je vous le dis tout de suite! Elle n’en reste pas moins tout aussi unique et en couleur! Attention néanmoins aux apparences! Derrière les murs somptueux du palais, les apparences sont trompeuses, et les alliances fragiles. Dans un monde secret et impitoyable, une jeune héroïne devra apprendre vite les ficelles, car sa mission sera aussi noble que périlleuse! Sera-t-elle prête à affronter son avenir et celle de l’empire?

Servir le jeune empereur, oui. L’épouser, non merci !
On se trouve ainsi dans l’empire de Koen, où la situation est exceptionnellement catastrophique : le trône est occupé par un empereur… âgé de seulement cinq ans ! Un jeune aussi innocent qu’inexpérimenté! Une aubaine pour la noblesse bien sûr, qui y voit une occasion en or pour tirer les ficelles du pouvoir, puisque le jeune n’a pas encore choisi d’épouse. En effet, la famille de la future épouse du souverain détiendra, de fait, les rênes du pays, ce qui amène une lutte de pouvoir mesquine et dangereuse au sein même du palais.
C’est pourtant dans ce contexte que Linfa, l’aînée du prestigieux clan Ryu, se retrouve plongée malgré elle aux jeux de pouvoir de la cour. Son père, calculateur, ambitieux et insoucieux d’elle, va alors la désigner comme candidate potentielle aux fiançailles impériales, sacrifiant sans hésiter les désirs de sa fille pour combler ses propres ambitions politiques. À seulement 17 ans, Linfa n’a cependant aucune intention de se laisser enfermer dans un mariage arrangé, et encore moins avec un petit garçon de 12 ans son cadet! Étant vive, franche et très peu encline à la soumission, elle a déjà réussi à décourager tous ses précédents prétendants — des qualités qui, dans son milieu, sont tout sauf valorisées. Les plans lui permettaient toujours de préserver son indépendance! Cette fois, cependant, elle n’a que peu d’options: accepter d’épouser l’empereur… ou être mariée de force à un clan rival, devenant à la fois espionne pour son père et prisonnière d’une alliance imposée, et cela, c’était hors de question!

Linfa va donc entrer au palais lors de la cérémonie des concubines, soirée où l’heureuse élue sera enfin choisie pour devenir la femme de l’Empereur! Mais contre toute attente, son tempérament singulier attire plutôt l’attention de Soren, le régent de l’Empire, une jeune homme aussi séduisant que redouté si l’on s’en fit aux rumeurs du palais. Celui-ci lui proposera alors une alternative inattendue : devenir gouvernante du jeune monarque au lieu de future impératrice. Pour Linfa, c’est une véritable chance de préserver son indépendance tout en restant proche du pouvoir, une situation favorable pour tous, mais qui n’est certainement pas sans danger! Parviendra-t-elle à atteindre son objectif avant qu’il ne soit trop tard? Et pourra-t-elle conserver cette indépendance qui la rend si unique … et dérangeante pour certains?
Une expérience visuelle unique
Les dessins de Haruki Yoshimura constituent l’un des atouts majeurs de La Servante de l’empereur et je ne pèse pas mes mots en disant cela! Dès les premières pages, j’ai été choquée et ébahie par la finesse du dessin, à la fois expressif et délicat. Chaque case est incroyablement détaillée: les décors du palais, inspirés d’une architecture impériale asiatique classique, sont soigneusement construits pour démontrer à la fois la grandeur et l’assujettissement du pouvoir… On y retrouve des costumes traditionnels aux tissus fluides et aux motifs floraux minutieusement dessinés qui viennent renforcer avec élégance l’univers visuel, tandis que de petits éléments comme des halos lumineux ou des pétales en arrière-plan viennent accentuer les émotions et les moments clés de l’intrigue avec une belle subtilité. Cette attention portée à l’esthétique est tout à fait en accord avec l’ambiance de cour impériale où chaque geste, chaque regard, chaque silence a son importance.
Les mimiques des personnages jouent également un rôle essentiel dans la narration. Tantôt malicieuses, tantôt attendrissantes ou carrément venimeuses, elles offrent une lecture en profondeur des relations sociales à l’œuvre, même lorsque les dialogues se montrent ambigus. Un simple haussement de sourcil ou un sourire en coin en dit parfois plus long qu’un discours. Cela permet aux lecteurs les plus attentifs de capter les non-dits et de ressentir pleinement l’hypocrisie cachée derrière certains échanges ou, au contraire, la tendresse dissimulée derrière une attitude plutôt froide. Il s’agit tout simplement d’un chef-d’œuvre visuel qui permet de développer davantage le récit, les personnages et l’attachement des lecteurs à ceux-ci. Un talent à ne pas négliger selon moi!

Un décor connu, une héroïne peu commune
La redécouverte du palais impérial comme scène central des mangas du même genre pourrait donner une impression de redondance à certains et même des scènes de «déjà-vu» avec des intrigues entre les personnages au sein même de la cour. Toutefois, cette relecture d’une héroïne, enfant de la haute société, qui se retrouve dans le rôle d’une servante plutôt que de donner des ordres à ceux-ci amène une belle nouveauté à ce décor. Linfa est une jeune femme aussi incroyable que notre apothicaire ou notre médecin et ses caractéristiques uniques amènent une approche totalement différente et un point de vue unique sur la relation serviteur/maitre qui n’est pas transposé dans les autres mangas de style impériaux.
J’ai donc bien hâte de découvrir ce que cette nouvelle place pour Linfa apportera à l’histoire et comment le récit se poursuivra avec notre jeune noble comme servante de l’empereur! Et bien sûr, les histoires d’amour qui seront certainement au rendez-vous! Une belle découverte encore une fois, alors je suis vraiment ravie d’avoir donné la chance à ce manga. Après une mise en place du décor et des personnages hors du commun, je dois dire que j’attends la suite avec impatience!
Merci à Interforum pour la copie du livre.


Pour se procurer le manga, c’est ici.


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