Après Fruitvale Station, Creed, Black Panther et Black Panther: Wakanda Forever, Ryan Coogler nous présente sa nouvelle réalisation, mettant en vedette, à nouveau, Michael B. Jordan qui nous présente un double rôle. Le film combine épique historique, blues et histoire de vampires, le tout imprégné de la culture afro-américaine.

Une nuit musicale et sanglante
Michael B. Jordan incarne des jumeaux du Mississippi durant l’ère de la prohibition américaine. Les jumeaux, gangsters et vétérans, décident de démarrer un « juke joint » (un lieu de rassemblement afro-américain connu pour sa musique, ses danses, ses jeux et ses boissons). Ils recrutent plusieurs personnes pour partir leur entreprise, dont leur cousin Sammy (ou Preacher Boy), qui est un fils de pasteur et un musicien aux dons exceptionnels. Alors que leur soirée de lancement se déroule à merveille, d’étranges visiteurs viennent le perturber…

Une distribution impeccable
Michael B. Jordan joue probablement l’un des meilleurs rôles de sa carrière — ce qui en dit long. Non seulement joue-t-il un double drôle, plusieurs fois avec les personnages qui interagissent entre eux à l’écran, mais il incarne ses rôles de manière à donner une identité propre à ses personnages, ce qui nous permet de les distinguer de l’autre.
Un autre acteur mémorable est Miles Caton. Sammy/Preacher Boy est son premier rôle. Et d’après sa performance, il a un grand avenir au cinéma devant lui.
D’autres acteurs mémorables incluent Hailee Steinfeld, Wunmi Mosaku, Jack O’Connell, Jayme Lawson, Omar Lindo, Li Jun Li, Saul Williams, et Delroy Lindo. Les arcs et temps à l’écran varient entre les personnages, mais chacun a su imposer sa présence, particulièrement Lindo, Steinfeld, Mosaku, et O’Connell.

Un mélange de genres
Comme mentionné plus haut, le film combine plusieurs genres, à la manière de From Dusk Till Dawn. En plus d’être un film d’horreur de vampires, il est aussi un drame épique historique (se déroulant au sud des États-Unis durant la prohibition), une histoire de gangsters, et, dans un certain sens, une comédie musicale.
Bien entendu, ce dernier point n’a rien à voir avec les comédies musicales habituelles comme Moulin Rouge ou La La Land. C’est plutôt que la musique prend une place centrale dans l’intrigue. En plus d’être vitale au personnage de Sammy, elle sert également de véhicule pour explorer les idées du film avec des visuels (particulièrement dans une scène au milieu du film qui combine différents types de musique, reliés à la culture afrodescendante, à travers les époques), et de cataclysme pour les incidents à venir. Ludwig Göransson, le compositeur de la bande sonore, est aussi un collaborateur de longue date de Coogler, et il fait à nouveau un chef-d’œuvre phénoménal ici.
Et malgré ce mélange de genres, le film reste cohérent, et ne semble pas discontinu par moment. Là où certains films se seraient plantés, Sinners arrive à accomplir l’impossible, sans nuire à l’intrigue ou le rythme du film.

Les thématiques explorées
En plus de la musique, le film examine divers thèmes avec brio, chacun pouvant faire le sujet d’une dissertation complète.
La tentation est abordée par les méthodes de persuasion des vampires. Plusieurs péchés capitaux (notamment l’avarice, la luxure, la colère…) sont employés pour leurrer leurs victimes. Par ailleurs, les personnages du film sont majoritairement amoraux, étant donné qu’ils participent à un commerce illicite mené par des gangsters, et commettent même des choix douteux (incluant une scène d’adultère). Le père de Sammy évoque ce point au début du film : « À force de danser avec le diable, il va te suivre jusqu’à chez toi. »
Le film rend aussi hommage à différents aspects de la culture afro-américaine. Avec la musique comme mentionnée plus haut, mais aussi en explorant diverses facettes de la spiritualité, notamment avec le père de Sammy qui est révérend, et Annie, la femme d’un des jumeaux, qui pratique le hoodoo. Les croyances des deux personnages enrichissent les autres thèmes de l’histoire, tout en donnant une identité propre au film.
Un autre aspect que le film explore de la culture afro-américaine est le principe du « Black Excellence », qui représente la célébration d’un exploit remarquable accompli par une personne noire. Autant ce terme est utilisé de manière positive, il a aussi été le sujet de critiques, un peu à la manière de « Girl Boss ». Pour faire court, ces deux termes représentent un paradoxe pour une personne marginalisée qui essaie de s’émanciper dans un système (souvent capitaliste) qui n’est pas conçu pour aider les marginaux, mais pour préserver le statu quo en conservant les personnes en haut de la hiérarchie en haut. Cet aspect est exploré dans le film avec le projet du juke joint, et les obstacles, dus au système et aux tensions interraciales à l’époque (qui fait malheureusement encore écho de nos jours), qui compromettent leurs projets d’un jour meilleur.
Je pourrai continuer pendant des heures, mais le film vous fera discuter sur plus d’un sujet après le visionnement.

Conclusion
Sinners est déjà considéré comme l’un des meilleurs, sinon le meilleur film de l’année. Et avec une forte distribution, une bande sonore électrisante, une forte intrigue riche en rebondissements et thématiques, il mérite sa réputation. Dans un domaine où les franchises et remakes sont omniprésents, ce sont des histoires originales comme celle-ci que nous devons encourager.

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